La traversée vers le Brésil se joue en deux mouvements. Le premier bercé par les alizés, le second par le pot au noir. Les calmes. Les grains. La pluie. Le corps met cinq jours environ pour prendre le rythme, s’adapter, se laver de la terre. C’est vrai, la mer nous lave. Lorsqu’il ne reste plus rien, des jours durant, autour de nous, on se lave de tout ce que notre corps et notre esprit aura construit dans une vie entière d’adaptation au monde. Un retour à l’état naturel. Pur. Simple. Quand il n’y a plus rien, que l’on n’a plus besoin de rien, on se satisfait à soi-même. On est débarrassé des envies, jalousies, illusions, faux buts et faux espoirs, faux devoirs. De la peur de l’échec, de la peur du futur, de la peur de l’inconnu. Je n’ai pas eu peur au large. À se demander si tous ces poids qu’on se trimballe sont réellement les nôtres… Je ne suis pas le seul à faire ce constat, Moitessier en parle dans La Longue Route, Saint Exupéry dans Terre des Hommes. De cette peur qui nous hante et nous empêche. Nous façonne au point de ne même plus parfois arriver à voir que c’est elle […]